20120206

Editorial

            Les élections, quelles qu’elles soient, et dans n’importe quel pays européen (France, Allemagne, Hongrie, Italie, … pour les exemples les plus récents), ont cela de bien qu’elles révèlent l’indifférence politique, et des politiques, à l’égard de l’Europe. Indifférence évidemment calculée, tant à l’égard de l’idée d’Europe, d’ailleurs, qu’à l’endroit de sa réalité et des engagements envers son dessin actuel contenu dans l’UE. Indifférence voulue pour mieux faire valoir le couple populisme-sauveur.
            Le populisme régnant semble plier les candidats aux élections à une occupation des médias cantonnée au nationalisme. Du plus navrant au plus dangereux. Un populisme qui s’invente en un « peuple » qui n’existe pas. Un populisme qui se fait exclusion, répulsion, rejet de toute altérité au nom d’une identité qui tient plus de la ruine des activités de toute démocratie que d’autre chose. Un populisme qui, pour se répandre, invente des récits de la nation, des mythes et des fictions, qui offrent surtout des accroches sentimentales et des coalitions d’intérêts prétendant occuper tout l’espace de visibilité, du moins politique, afin d’en éloigner tout autre distribution et de faire taire les velléités de nouveaux partages. Un populisme, enfin, qui en appelle à des « sauveurs » en lieu et place de citoyennes et de citoyens.
            Propagande et démagogie sont des termes encore trop faibles pour parler de ces phénomènes. Ils travaillent sur une palette assez large de paramètres politiques, esthétiques, historiques, et de storytelling. Ils forgent un imaginaire contemporain tissé autour de l’éradication de l’altérité, et pas seulement de son enfermement dans le silence. Ils peignent des mœurs et des coutumes entichées d’une gestion qui prétend faire vivre la cité immobile comme l’huître sur son rocher.
            Les injustices « du sort » (de l’histoire, de la politique, de la société) y demeurent un nœud puissant de refoulement. Les vies humaines actives et industrieuses n’y voient pas leur caractère renouvelé. Les humains n’y existent, politiquement parlant, que par un habile calcul en apparence plein de droiture et de loyauté.
            À son encontre, l’idée d’Europe, qui demeure encore à bâtir, forme une sorte de point stratégique également précieux aux femmes et aux hommes qui veulent faire rempart à la plus funeste immobilité de l’identité. Ouverte, accueillante, amicale, solidaire, cette idée – et les pratiques culturelles qui la représentent actuellement – se marie fort bien avec une culture diversifiée qui laisse entrer et sortir les personnes souhaitant entrer avec elle en interférence. Pour elle, renvoyer quelqu’un, c’est vouloir le perdre.
            La hardiesse d’une telle idée peut-elle venir à bout du populisme ? C’est sans doute un pari à faire qui ne sied qu’à ceux qui sont décidés à opposer au « commun » populiste un autre « commun » sans cesse à ouvrir, à parfaire, à relancer, à élargir et à confronter aux autres. Cette idée répugne à soumettre les intelligences et les personnes aux grandeurs vides auxquelles il faudrait seulement obéir. Entre se soumettre à des caprices grossiers et se battre pour élaborer une nouvelle perspective, il n’y a pas à hésiter. N’étant pas réprimée par les limites de l’étroitesse identitaire, cette idée peut passer dans les mœurs, dans le regard et dans les paroles de chacun et y encourager à déplacer sans cesse les lignes de front contre toute restriction.
            Elle donne à l’aventure de l’histoire un caractère spécifique qui rend aux citoyennes et aux citoyens le privilège de leurs actions.

Christian Ruby

20120205

Des ministères de la culture en Europe et de l’Europe ?

Christian Ruby
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In Vorbereitung des Vorschlags für das neue Programm « Europa für Bürgerinnen und Bürger » 2014-2020 hat die Europäische Kommission im Herbst 2010 eine Online-Konsultation durchgeführt, in dessen Rahmen das Bundesministerium für Unterricht, Kunst und Kultur eine Stellungnahme eingereicht hat. Das EU-Programm « Europa für Bürgerinnen und Bürger » unterstützt eine große Bandbreite von Aktivitäten und Organisationen zur Förderung einer aktiven europäischen Bürgerschaft. Ziele : Europa den BürgerInnen näher bringen, Förderung des Verständnisses der europäischen BürgerInnen füreinander, Kenntnis der Geschichte und Kultur europäischer Völker, Herausbildung einer europäischen Identität und Bürgerschaft auf Grundlage gemeinsamer Werte, Geschichte und Kultur, Förderung der aktiven Beteiligung von BürgerInnen am europäischen Integrationsprozess. Ist das alles ? Einen Überblick über die aktuellen Entwicklungen in den Bereichen bedeutenden kulturellen Institutionen in Europa ist wichtig. 

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Alcune politiche culturali si stanno sviluppando in Europa. Numerosi paesi si sono dotati di un Ministero della Cultura. Uno studio recente testimonia questi mutamenti. In seguito ad un colloquio dove ricercatori venuti da vari paesi europei hanno accettato di discutere le proprie esperienze presentando alcune monografie nazionali, si è constatato che diverse politiche pubbliche che interessano la cultura sono state intraprese da vari paesi. L’interesse di questo insieme editoriale, che rende questi interventi pubblici, consiste nel cogliere i cambiamenti principali che, “all’indomani della Seconda Guerra Mondiale, hanno caratterizzato il rafforzamento delle politiche pubbliche della cultura”. Tutto ciò, del resto, ha senso soltanto se si ammette che le politiche culturali hanno come obiettivo il costruire o ricostruire le identità nazionali; e se si ammette in parallelo che con il termine “politiche culturali” si intendono gli interventi dei diversi “avatar” dello Stato nel settore produttivo, della diffusione e del consumo di beni simbolicamente materiali e immateriali.

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Kültürel politikalar Avrupa’da hızla gelişiyor. Pek çok ülkede kültür bakanlıkları kuruldu. Yeni bir eser bu alandaki değişimleri ele alıyor. Avrupali araştırmacılarının kendi ulusal tecrübelerinin tartıştığı bir seminer sonrası, kültürel alanda pek çok ülkede kamu politikalarının üretildiği ortaya çıktı. Bu editorial birlikteliğinin esas amacı ise « ikinci dünya savaşı sonrası kültürel alandaki kamusal siyasetlerinin » nasıl geliştiğini vurgulamak. Bunu anlamak icin kulturel politikalarin ulusal kimligin insasi acisindan ne kadar onemli oldugunu, devletin uretim ve tuketim alanindaki konumunu tartismak kuskusuz buyuk onem tasiyor.
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Cultural policies are being developed in Europe.  Numerous countries have created a Ministry of Culture.  A recent book explains these changes.  Following a seminar regrouping a number of researchers from various European countries that shared their personal experiences and extensive research, we realize that cultural policies are being implemented in a large number of European countries.  This group of experts, which has made its conclusions public, seeks to understand the main evolutions that have “since the end of the Second World War, characterized public policies towards culture”.  Incidentally, this can only make sense if we accept that cultural policies aim at building, or rebuilding, national identities, as well as the definition of “cultural policies” encompasses all State-led actions to produce, diffuse and consume symbolic material and immaterial goods. 

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Depuis 1959, la France s’est dotée d’un ministère de la Culture. On peut discuter le bien fondé de cette instauration, il n’empêche, elle a fait tâche d’huile. Et ceci sous deux formes : sous celle de la création de ministères dans d’autres pays ; sous celle de l’expansion de politiques publiques culturelles. Du point de vue européen qui est le nôtre, ce constat appelle deux réflexions.  La première doit porter sur la nécessité d’enquêter, dès maintenant, dans chaque pays européen, sur l’existence ou non d’un tel ministère, afin de dresser un état des lieux comparatif. L’intérêt de ce type de recherche est de répertorier les institutions semblables, et de mesure les écarts dans les actions entreprises.  La seconde doit porter, cette fois, sur la nécessité ou non de dépasser ces institutions culturelles nationales en une institution internationale, ici européenne. En 2009, un colloque assez ample a réuni sous l’égide du comité d’histoire du ministère de la Culture et de la Communication, français, un certain nombre de chercheurs. L’objet ? Approfondir l’histoire de ce ministère, créé par et pour André Malraux (1959). Les premières interventions à ce colloque ont déjà fait l’objet d’un ouvrage - Cinquante ans après. Culture, politique et politiques culturelles, Elie Barnavie et Maryvonne de Saint Pulgent (dir.), Paris, La Documentation française, 2011. Mais voici qu’un autre volume est publié, qui rejoint nos préoccupations : Philippe Poirrier (dir.), Pour une histoire des politiques culturelles dans le monde, 1945-2011, Paris, La Documentation française, 2012.  Désormais, il s’agit d’enrichir et de détailler, grâce à des études de cas et d’autres témoignages recueillis durant le même colloque, la perspective générale de l’existence de politiques culturelles dans le monde. En effet, à l’époque même de ce colloque, de nombreux chercheurs venus de pays étrangers ont accepté aussi de discuter de leur expérience propre, et ont présenté en séances des monographies nationales, plus ou moins amples, et en tout cas attachées à préciser si un tel ministère avait pris corps dans le pays et si des politiques publiques y étaient conduites. L’intérêt de ce nouvel ensemble éditorial, qui rend ces interventions publiques, est de saisir les principales évolutions qui, nous indique-t-on dans l’Avant-propos, « depuis le lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ont caractérisé le renforcement des politiques publiques de la culture ». Ceci ne s’entend, d’ailleurs, que si l’on admet que les politiques culturelles ont pour ambition de construire ou reconstruire les identités nationales ; et si l’on admet parallèlement que par « politiques culturelles », il convient d’entendre les interventions des divers avatars de l’Etat dans le domaine de la production, de la diffusion et de la consommation de biens symboliquement matériels et immatériels (Laurent Martin).  Une réflexion globale avant de revenir sur le détail des interventions : s’il rassemble sur un même rayon de bibliothèque cet ouvrage présenté ici, le précédent cité ci-dessus, ainsi que L’histoire culturelle du contemporain (Paris, Nouveau Monde, 2005), Dix ans d’histoire culturelle (Evelyne Cohen, Pascale Goetschel, Laurent martin, Pascal Ory (dir.), Paris, Presses de l’enssib, 2011), et le Dictionnaire d’histoire culturelle de la France contemporaine (dir. Christian Delporte, Jean-Yves Mollier, Jean-François Sirinelli, Paris, Puf, 2010), le lecteur a à sa disposition, pour consultations fréquentes, un riche ensemble de propos susceptible de l’aider à comprendre le fonctionnement des politiques publiques de la culture étroitement liées, c’est évident, à la consolidation des Etats nations, après la Seconde Guerre mondiale, et les conditions qui sont faites à la culture en Europe. Mais il est clair qu’avec ce dernier volume, ici présenté, le rayon des lectures indispensables prend de l’ampleur. Un pas de plus, et le lecteur pourrait disposer d’une histoire de la politique culturelle en (ou plutôt de l’) Europe, un ouvrage encore dans les limbes, mais qu’il conviendra bientôt d’ajouter aux précédents, si jamais une telle initiative était prise par des chercheurs, et si cet objet prenait réellement corps dans la réalité. Le Conseil de l’Europe a tendu des perches en ce sens, il nous faut le souligner. Il a lancé en ce sens un programme de recherche action en 1986 et 1998, dont nous attendons les résultats. L’Observatoire des politiques culturelles de Grenoble n’est pas sans avoir lui non plus déjà sensibilisé son public à la dimension comparée des politiques culturelles.  Ici, donc, s’agissant très nettement de l’élaboration d’une démarche comparative il fallait tenter d’intégrer dans le volume la plus grande part des politiques nationales mais aussi celles des institutions internationales et transnationales. Il reste que cela ne pouvait exclure une difficulté nouvelle présentée désormais par le contexte de globalisation qui est le nôtre et qui rend possible l’émergence de nouvelles normes de politiques publiques, voire, comme l’annonce déjà un titre d’ouvrage : La fin des cultures nationales (Lluis Bonet et Emmanuel Négrier (dir.), Paris, La Découverte, 2008). Cela dit, prendre en compte chacune de ces dimensions nationales, cela revient aussi à saisir une diversité d’approches de la question, certains pays instrumentalisant la culture, d’autres refusant la création d’un tel ministère de la culture, les troisièmes se contentant de favoriser l’émergence de Fondations culturelles, les autres encore préférant la formule ministérielle dispersée (caractéristique aussi, en France, de la séparation de la culture scientifique et de la culture artistique réfugiées chacune dans un ministère différent). Les architectures administratives ne sont donc pas identiques, mais les projets aussi diffèrent. Interventions publiques et initiatives privées se côtoient ou se composent, ou encore se réfutent. Les objectifs se recoupent aussi, mais parfois ils se confrontent vivement : démocratisation de la culture ne rime pas nécessairement avec soutien à la création, rayonnement national ne fait pas toujours bon ménage avec défense de la diversité culturelle, ...  La richesse thématique et politique de cet ouvrage est telle, concernant l’exposé des politiques publiques de la culture d’un pays à l’autre, que nous ne pouvons dans un compte rendu du type présenté ici rassembler tout ce que nous pouvons en tirer. Nous allons donc nous borner à attirer le lecteur vers cet ouvrage en présentant quelques éléments clefs des propos tenus pas les chercheurs.  Tout d’abord, quelques réflexions sur les politiques culturelles en question, du moins sur quelques traits dont nous cru pouvoir observer qu’ils étaient communs aux différentes institutions nationales : La lecture de l’ouvrage révèle clairement qu’une longue tradition faisait auparavant dépendre, dans de nombreux pays, la culture des ministères de l’intérieur. Il faut attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour voir se dégager, et d’ailleurs par surprise en France, l’idée même d’un ministère spécialement dévoué à cette cause. Sachant que, par la suite, la « sortie » des configurations fascistes (Espagne, Portugal) et la reconquête de la démocratie, ou l’extraction des configurations « soviétiques » (RDA, Bulgarie) et de l’effondrement du communisme d’Etat, ont pris du temps, la question de tels ministères de la culture a mis non moins longtemps à s’établir et à se concrétiser. Il n’empêche, dans tous les cas, poser officiellement la question de l’existence ou non de politiques publiques de la culture dépend de la capacité d’une société à donner un sens public au terme « culture », non sans l’assortir d’une signification en rapport avec une laïcisation de la culture, elle dépend aussi d’une attention portée à la formation générale de la population, et de la reconnaissance de l’art comme sphère autonome. En un mot, sécularisation et publicisation sont les deux déterminations à partir desquelles ces politiques se sont élaborées, depuis 1945.  Une fois le principe établi (et le projet d’une institution), qu’il se traduise ou non par l’instauration d’un ministère – et au passage, lorsqu’un tel ministère se crée, il faut encore le nommer, et l’affaire n’est pas mince comme le montrent les différents articles (ministère de la culture (France, Danemark), ministère d’Etat pour les affaires de la culture et des médias (Allemagne), ministère des affaires culturelles (Belgique), ministère de la promotion des savoirs (Bulgarie), ministère pour les biens culturels (Espagne), …) – chacun se pose la question de savoir s’il convient, à travers cette institution, de conduire une politique de prestige ou de déployer un nouvel ancrage social de la culture. L’option est évidemment très différente. Dans tous les cas, cependant, et là encore, la politique en question se livre sous deux angles : une politique des bâtiments (des lieux disponibles pour la culture), contribuant à étendre un type de maillage du territoire (exemple paradigmatique : les maisons de la culture) ; une politique de la production culturelle que la plupart des pays souhaite pluraliste, seule la Belgique, si nous avons bien lu, acceptant de prévoir que ces institutions culturelles se livrent à « l’analyse critique de la société et la stimulation d’initiatives démocratiques et collectives, le développement de la citoyenneté active et l’exercice des droits sociaux, culturels, environnementaux et économiques ».  Au-delà de ces éléments qui nous paraissent plutôt communs à l’ensemble des propositions ministérielles découvertes dans cet ouvrage (le classement des articles étant organisé en fonction de l’ordre alphabétique par nom de pays : Allemagne, Australie, Belgique, Danemark, Espagne,… jusqu’à Suède et Suisse), il faut signaler que chaque chapitre du livre développe abondamment les politiques choisies par le pays de référence. Nous ne rendons pas compte ici de ces « détails » forts importants et bien mis en valeur. Des traits distinctifs apparaissent alors qui prennent sens au sein d’une histoire nationale variant à chaque fois (et conditionnée pour les uns par les défaites et la réunification, pour les autres par l’héritage autoritaire compensé par l’ouverture sur le monde latino-américain, pour les derniers par la ratification de la Convention Internationale pour la protection des artistes, ...).   Il reste qu’on peut regretter de ne pas voir se dessiner, grâce à un article au moins, soit les linéaments d’une politique mondiale de la culture (Unesco à tout le moins), soit une politique européenne de la culture, nous y revenons. Les convergences européennes sont évidentes dès lors qu’on lit dans l’ouvrage les rapports concernant chaque pays de cet espace, considéré dans les années récentes. Mais suffisent-elles à définir du commun à cette échelle. Une politique culturelle européenne (étatique et administrative) se dessine-t-elle ? Il eut sans doute été bon de le préciser, dans cet ouvrage, même si on peut en trouver les éléments répandus dans d’autres livres.  Il revient à Pierre-Michel Menger de conclure ce volume. En substance, l’auteur évoque d’abord le lien entre ces politiques publiques de la culture et l’histoire de la construction de l’Etat-providence. Il note par conséquent des trajectoires similaires dans les pays concernés. En revanche, la comparaison, affirme-t-il, souligne des différences plus visibles dans la mise en œuvre des choix d’organisation : centralisation ou déconcentration ou véritable régionalisation (avec organisation fédérale). Il observe ensuite que ces questions de politiques culturelles se nouent presque toujours autour d’une définition de la culture homogène, identifiée le plus souvent à la culture savante, à ses hiérarchies, ses classements, ses principes de renouvellement ou de décantation sélective. Longtemps, chacun le sait, la culture fut chargée de symboliser une identité nationale, même si, à d’autres égards, elle prétendait aussi incarner des valeurs universelles.  Mais progressivement, en se développant, l’action publique est prise en tenailles. D’un côté, sa dynamique est celle de la différenciation des actions : soutien plus direct à la modernité artistique, programmes plus systématiques d’aide à la création et de rénovation du patrimoine artistique et culturel ; de l’autre côté, la conception plurielle de la culturel (liée simultanément à la différenciation territoriale de l’action publique). Au fil du temps, la définition même de la culture se transforme. Pierre-Michel Menger revient en effet sur l’opposition classique mais répétitive entre la culture conçue comme ou identifiée à la culture savante et la culture au sens anthropologique et relativiste. L’enjeu, entre autres, est de savoir comment et si on inclut la question des industries culturelles dans la sphère des politiques publiques. Les pays nordiques, faut-il le rappeler, demeurent très attachés à une philosophie de la démarchandisation de la culture et des biens publics.  Reste évidemment la question centrale désormais des politiques culturelles à reconfigurer à l’aune de la reconnaissance du multiculturalisme, et de la promotion des industries dites créatives. Il semble sur ce plan que, parmi les « ministères » de la Culture seul le ministère britannique ait pris la mesure de l’ampleur du phénomène.  Maintenant, et pour ne pas terminer sur une note joyeuse, il importe de renouer avec une question d’actualité à traiter dans un ouvrage futur : celle de savoir si ces politiques publiques de la culture vont résister à la « crise » en cours, et surtout comment ? 

20120204

Observatoire européen du plurilinguisme
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European Council Ministers have been studying the question of language competences as a prerequisite to employability, employment and growth, as well as imposing that at least 2 languages be taught to children at the youngest age.  Their conclusions were that “a boarder selection of languages, including less widespread ones and those spoken in neighbouring countries, should be proposed, if possible, at all levels of education”.  We must understand that it is vital to improve the level of languages in Europe, and that it is not desirable to teach only one language in schools, nor that language awareness should be increased solely by exposure to English.

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Il Consiglio europeo dei ministri si è interessato alla questione delle competenze linguistiche come ad una delle condizioni da prendere in considerazione per la ricerca lavorativa, dell’impiego e della crescita economica, unitamente al requisito che almeno due lingue siano insegnate nella comunità europea fin dalla tenera età. Le conclusioni adottate ricordano che “una scelta più vasta di lingue, comprese le lingue meno diffuse e le lingue dei paesi limitrofi, dovrebbe nel limite del possibile essere proposta a tutti i livelli scolastici, in una prospettiva di educazione e di formazione per l’intero arco della vita”. Dobbiamo renderci conto che è indispensabile alzare e migliorare il livello della conoscenza linguistica e che non è da considerare opportuno che una sola lingua sia insegnata alle scuole elementari, né tanto meno che la sensibilizzazione alle lingue nelle scuola elementare riguardi unicamente l’Inglese.


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Avrupa Bakanlar Konseyi istidham, iş ve kalkınma alanında lisan öğretimi sorusuna değindi. Konsey, Avrupa coğrafyasında en az iki lisanın öğretilmesi gerektiğinin altını çizdi. Kabul edilen sonuçlara göre, « daha geniş ve daha az yaygın komşu ülkelerdeki lisanlar mümkün olduğu kadar fazla Avrupa çapında uzun vadeli bir hayat için öğretilmeli ». Konsey, lisan seviyemizin yükselmesi ve ilk okulda tek lisanın öğretimine duyarlaştırmamızın yanlış olduğunu ve bu duyarlaştımanın yalnızca ingilizce vasıtasıyla olmasının gerekigini vurguladi.


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Nous publions, ci-dessous, un communiqué de l’observatoire européen du plurilinguisme. Il s’agit de la Lettre d’information n°43, janvier 2012.
Le Conseil européen des ministres « Education, culture et jeunesse » le 28-29 novembre 2011 s'est à nouveau penché sur la question des compétences en langues comme condition de l'employabilité, de l'emploi et de la croissance et sur l'impératif qu'au moins deux langues soient enseignées dès le plus jeune âge. Les conclusions adoptées rappellent qu' « un choix plus vaste de langues, dont des langues moins répandues et les langues des pays voisins, devrait, dans la mesure du possible et s'il y a lieu, être proposé à tous les niveaux d'enseignement dans une perspective d'éducation et de formation tout au long de la vie ». Il faut comprendre qu'il est impératif d'élever et d'améliorer le niveau en langues, et qu'il n'est pas souhaitable qu'une seule langue soit enseignée à l'école élémentaire, ni même que la sensibilisation aux langues à l'école maternelle se fasse uniquement au moyen de l'anglais.Cette résolution n'est pas la première, et ne sera pas la dernière. La grande caractéristique des résolutions européennes, qu'elles soient du Conseil de l'Europe ou de l'Union européenne, c'est à la fois leur caractère répétitif, cumulatif et leur relative inefficacité. La plus importante à nos yeux reste celle du comité des ministres du Conseil de l'Europe du 17 mars 1998, qui proposait un programme de développement du plurilinguisme à grande échelle. Chaque nouvelle résolution se réfère aux précédentes sous les dénominations les plus variées correspondant aux différentes instances. Mais, l'éducation étant de la seule compétence des Etats, les ministres nationaux ne s'estiment pas liés par leur signature et font souvent l'inverse dans leur propre pays.Rappelons quelques brillants exemples.On se souvient, cf. notre lettre N°19, que le gouvernement Berlusconi, porté par la vague néolibérale, avait mis en avant ses trois priorités nationales : informatica, impresa e inglese. Le résultat a été d'inviter les familles, par une disposition de l'article 25 d'un décret du 17 octobre 2005, à bloquer au profit de l'anglais les heures d'enseignement de la première et de la deuxième langue. Espérons que le nouveau gouvernement italien reviendra sur cette disposition scélérate et redonnera un peu d'air à l'enseignement des langues en Italie.Porté par la même vague anticipatrice, le gouvernement britannique, prévoyant sans doute l'avènement de l'anglais en tant que « langue unique », (cf. le discours de Georges Brown à New Delhi le 17 janvier 2008), décidait en 2004 de rendre l'enseignement des langues étrangères facultatif à partir de 14 ans, au motif de lutter contre l'absentéisme, car, disait le ministre de l'éducation britannique, « les langues fatiguent les petits Anglais ». Cette décision n'a pas fait les affaires des entreprises britanniques qui, ne trouvant pas les compétences linguistiques nécessaires chez les anglais, ont commencé à recruter des personnes parlant les langues étrangères.Quant à la France, les effets d'annonces se sont succédés. M. Darcos, ministre de l'éducation, a vu un futur français « bilingue », et a organisé pour les jeunes « en difficulté », la difficulté étant d'abord en français, des cours accélérés pendant les vacances en anglais. Impressionné par les performances des petits Singapouriens dans l'apprentissage précoce de l'anglais, et sous la pression de parents des quartiers chics de Paris, Luc Chatel a achevé, à la dernière rentrée scolaire, de démanteler ce qui commençait à exister en classe maternelle en matière d'éveil aux langues, pour le remplacer par une sensibilisation à l'anglais.Par chance, à côté de ces facéties médiatiques ministérielles, le ministère de l'éducation nationale annonce dans les documents officiels qu'il propose huit langues à l'école primaire, passant sous silence que 90,1 % des effectifs vont à l'anglais, 8,6 % à l'allemand (département de la Moselle et de l'Alsace), ce qui laisse 1,3% pour l'espagnol, l'italien, le portugais, le russe, le chinois et l'arabe. Bel exemple de diversité sur le papier mais pas dans les faits.Reconnaissons toutefois que, poursuivant la mise en oeuvre d'un ambitieux plan de rénovation de l'enseignement des langues lancé en 2005, deux langues sont désormais obligatoires dans l'enseignement général et technologique et dans les sections « services » de l'enseignement professionnel. C'est un progrès, neuf ans après le Sommet de Barcelone, et 13 ans après la résolution citée plus haut. Le ministre a mis en place en avril dernier un « comité stratégique des langues » composé de personnalités incontestables. Les conclusions qui en seront tirées et surtout les conséquences qui en découleront sont attendues avec le plus grand intérêt.Mais, après tant d'efforts de nos gouvernants pour imposer la prédominance de l'anglais de la maternelle à l'enseignement supérieur, on aurait pu espérer que les résultats soient au rendez-vous. Hélas, non !D'après une étude effectuée par le département d'anglais langue étrangère de l'université de Cambridge (ESOL), autorité de certification internationalement reconnue pour l'anglais, dont les résultats ont été présentés à l'Alliance française à Paris le 23 mars 2011, si le niveau en anglais s'est amélioré dans l'enseignement supérieur à partir du master, dans l'enseignement pré-universitaire en revanche, les résultats sont en baisse. Cela se vérifie dans quatre des cinq pays étudiés, en Allemagne, en Espagne, en France et en Italie, le Portugal étant le seul pays où des progrès ont été enregistrés à tous les niveaux entre 2004 et 2009.Ce résultat est tout à fait inattendu, mais comment ne pas le mettre en relation avec l'abaissement quasi général du niveau en lecture, phénomène analysé dans une étude du réseau Eurydice publiée en mai 2011, première étude paneuropéenne sur le sujet. Cette étude offre une image complète de l'apprentissage de la lecture et identifie certains des principaux facteurs qui influencent l'acquisition de compétences en lecture chez les enfants de 3 à 15 ans. En 2009, environ 20 % des jeunes de 15 ans éprouvaient des difficultés en lecture avec des variations importantes selon les pays. Parce qu'elle est une image, cette étude est toutefois dépourvue de toute perspective dynamique ce qui lui permet de célébrer l'amélioration des systèmes d'enseignement et des méthodes pédagogiques, alors que l'abaissement du niveau en lecture depuis 10 ans est avéré (cf. notamment les statistiques de ministère français de l'éducation évoquées dans notre Lettre N°40). Cependant la richesse des éléments fournis et particulièrement les comparaisons internationales permettent de dire que si la volonté politique existe, il est possible de lutter efficacement contre les difficultés en lecture et contre l'échec scolaire. Aussi, sur l'invite de la Commission européenne, les pays européens ont accepté de réduire cette proportion sous la barre des 15 % d'ici à 2020. C'est l'un des grands objectifs du programme 2020 de l'Union européenne.C'est très bien, mais à mesurer la place réservée à cette question dans les programmes politiques et dans les campagnes électorales, en France par exemple (merci à nos lecteurs et correspondants de nous faire remonter des informations sur le sujet dans tous les pays européens !), on est obligé d'en déduire que la question n'est pas perçue comme pertinente ou comme un enjeu, et donc que les choses ne sont pas prêtes de changer. Retenons donc que le fait d'envoyer dans le mur 20% des générations d'enfants, parce qu'ils n'ont pas la langue, n'est pas considéré par la plupart des partis politiques comme une question importante ! L'opinion publique n'en est pas davantage consciente, pensant peut-être qu'il s'agit d'une fatalité face à laquelle nous ne pouvons rien faire. Alors que cela devrait être un grand défi national et européen pris en charge dans chaque pays.





20120203

La Déclaration de Varsovie sur le rôle des langues

Der neue SPD-Politiker Martin Schulz (2012) ist heute zum neuen Präsidenten des Europäischen Parlaments gewählt worden. Er sagte nach seiner Wahl, es gebe eine Vertrauenskrise in die institutionen und die Politik. Die Bürger seien weniger an den institutionnellen Debatten in der EU interessiert, sondern viel mehr an ihren Arbeitsplätzen, ihrer Rente oder sozialer Gerechtigkeit. Schulz wandte sich gegen die Vergipfelung der EU-Politik. Entscheidungen, die jemandermann etwas angingen, würden von den Staats- und Regieringschefs hinter verschlossenen Türen getroffen, ohne Beteiligung des Parlaments. Und was mit die Sprachen ? Unsere Aufgabe ? Europa sei gegründet worden, um den Hass zu überwinden. Aber wie ? 

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 Il 28 e 29 settembre 2011 si è tenuta a Varsavia la conferenza organizzata della Presidenza Polacca del Consiglio dell'UE e la Commissione Europea. Intitolata “Competenze plurilinguistiche per una riuscita professionale e sociale in Europa”, questa conferenza è stata dedicata al ruolo delle lingue nella preparazione dei cittadini ad operare in una Europa plurilingue e multiculturale.

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On September 28 and 29, 2011, the Polish presidency of the European Commission organized in Warsaw a conference entitled “Multilingual competences for social and professional success in Europe”.  The conference focused on the role of languages in preparing citizens to function in a multilingual and multicultural Europe.

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Gectigimiz 28 ve 29 Eylul 2011'de Varsova'da Avrupa Komisyonu ve Polonya'nin AB baskanligi cercevesinde ''Avrupa'da profesyonel ve sosyal basari icin cok lisanlilik'' konferansi duzenlendi. Konferansta lisanlarin cokkulturlu ve coklisanli vatandaslarin olusumuna nasil kaktki sagladigi tartisildi.

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Les 28 et 29 septembre 2011 s’est tenue à Varsovie la conférence « Compétences multilingues pour une réussite professionnelle et sociale en Europe » organisée par la présidence polonaise du Conseil de l’UE et la Commission européenne. La conférence a été consacrée au rôle des langues dans la préparation des citoyens à fonctionner dans une Europe multilingue et multiculturelle.
A la conférence ont participé les experts dans le domaine de l’enseignement des langues provenant des Etats membres de l’Union européenne, les enseignants et les professeurs des universités, les représentants des centres de recherche, des agences nationales du Programme pour l’éducation et la formation tout au long de la vie, les coordinateurs du Label européen des langues, les employés de l’institution qui s’occupent de l’enseignement des langues étrangères, de la formation et du perfectionnement des enseignants, des associations de traducteurs, les étudiants ainsi que les représentants des institutions de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe.
Les participants à la conférence :
a) ont exprimée leur satisfaction du fait que la conférence a traité d’une manière universelle les différents aspects de l’éducation linguistique, y compris notamment l’enseignement maternel et primaire, l’enseignement dans les classes multiculturelles, l’enseignement professionnel, la formation pour la mobilité, l’internationalisation de l’enseignement supérieur et les besoins du marché des services linguistiques ;
b) ont souligné que la création en 2001 par l’Union européenne et le Conseil de l’Europe de la Journée européenne des langues a largement contribué à sensibiliser les Européens à l’importance des compétences linguistiques ;
c) ont exprimé leur conviction que les projets réalisés dans le cadre du concours Label européen des langues promeuvent la pluralité linguistique de l’Europe, constituent une base importante des meilleures pratiques innovantes dans l’enseignement des langues, enrichissent et rendent plus attrayantes les pratiques nationales de l’enseignement et de l’apprentissage des langues étrangères grâce à la mise en oeuvre des programmes de formation linguistique, des méthodes d’enseignement innovantes et l’utilisation des technologies de communication modernes ;
d) ont apprécié les réalisations de la Commission européenne et des Etats membres dans le domaine du multilinguisme, notamment „le paquet linguistique” adopté en été 2011 ;
e) ont demandé d’assurer une place adéquate de la promotion d’apprentissage et d'enseignement des langues étrangères dans la nouvelle génération des programmes de l’UE concernant l’éducation et les jeunes;
f) ont exprimé l’opinion que la constitution par la Commission européenne d’un Groupe de travail permanent sur les langues contribuerait à renforcer la coopération, l’échange des expériences et des bonnes pratiques entre les Etats membres dans le domaine du multilinguisme et permettrait une meilleure préparation des citoyens à la mobilité éducative et professionnelle.
La conférence a souligné qu’une bonne connaissance des langues étrangères et la capacité de les utiliser sont aujourd’hui une compétence clé indispensable pour fonctionner dans le monde contemporain et sur le marché de travail. Cette compétence augmente les chances éducatives des jeunes et la mobilité professionnelle des adultes. Les conclusions des travaux des groupes de discussion ont confirmé que le multilinguisme constitue non seulement le patrimoine de l’Europe mais aussi l’opportunité de créer une société ouverte, respectant la diversité culturelle et prête à coopérer.
Varsovie, le 29 septembre 2011


20120202

L’Europe, chantier de la traduction

Ghislaine Glasson Deschaumes / Boris Buden----------------------------------------------------------------------------------

Site eipcp : Institut européen pour des politiques culturelles progressistes (en devenir). europäisches institut für progressive kulturpolitik. european institute for progressive cultural policies

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Transeuropéennes  is an active process – it is a movement in critical thought. It is underpinned by a reason in which theory and action are intimately linked.  Action and reflection. Action generates reflection. Reflection triggers action. It is its “falling trajectory”, to borrow an expression used by the composer Ahmed Essyad to evoke what the musical phrase must strive for. This is what has happened with Transeuropéennes since 1993: actions and reflection intimately linked to bring about the political. Critical thought has been at work in training and research activities, in militant action across borders and indeed in hospitable encounters. It was about allowing the necessary confrontation of differences to become interaction, to become a melee – the melee in praise of which, in homage to a Sarajevo under siege at the time, Jean-Luc Nancy launched the first issue of Transeuropéennes in the autumn of 1993 (“In praise of the melee”). This is one of the strands from which we developed the concept of “translating, between cultures”.

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Transeuropéennes è un processo attivo, è un movimento di pensiero critico. È sostenuto da una ragione in cui teoria e azione sono intimamente connesse. Azione e riflessione. Azione genera riflessione. Riflessione innesca azione. È la sua “traiettoria di caduta”, per usare un’espressione usata dal compositore Ahmed Essyad nell’evocare ciò che la frase musicale deve realizzare. Questo è quello che è successo con Transeuropéennes a partire dal 1993: azione e riflessione intimamente connesse per generare il politico. Il pensiero critico è stato presente nella formazione come nelle attività di ricerca, nell’azione militante attraverso frontiere ma anche in ospitali incontri. Si trattava di permettere il necessario confronto di differenze nel loro divenire interazione, per dare seguito ad una mischia, in lode alla quale, in omaggio alla Sarajevo assediata, Jean-Luc Nancy lanciò il primo numero di Transeuropéennes nell’autunno del 1993 (“in lode della mischia”). Questo è uno dei fili da cui abbiamo sviluppato il concetto di “traducendo, tra culture”.

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Transavrupa aktif bir surec, bir hareket, kritik bir dusunce. Temeli teori ve mudahalenin yakindan birbirini besledigini ve destekledigine dayaniyor. Hareket ve dusunce. Hareket dusunce yaratiyor. Hareket dusunce uretiyor. Musizsyen Ahmed Esyad'in deyimiyle dusunce ''bozulmamis bir yorunge'' gibi. Transavrupa'nin 1993'den bu yana uretikleri bu yonde - hareket ve dusunce birbirini besleyerek siyaset dogruyor. Kritik dusunce kendini calistirmak ve arastirmak icin vazgecilmez bir unsur, yeniliklere katkida saglamayi iceriyor. Bu etkilesim, fikir alisverisi, Sarejovu'nin egemligini kaybettigi donemlerde, Jean-Luc Nancy tarafindan 1993 sonbahar doneminde Transavrupa eserinde yer aliyor. Bu calisma vasitasiyla ''kulturler arasi ceviri'' gelismistir. 

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Transeuropéennes ist ein aktiver Prozess, eine Bewegung kritischen Denkens. Der tragende Grund ist die enge Verbindung von Theorie und Handlung. Die Handlung fordert die Reflexion heraus. Die Reflexion setzt die Handlung in Gang. Sie ist ihr „Fallweg“, um eine Äußerung des Komponisten Ahmed Essyad aufzugreifen, der damit wachruft, wonach eine musikalische Phrase streben muss. Bei Transeuropéennes ging es also seit 1993 um die enge Verbindung von Handlungen und Reflexionstätigkeit in der Herausforderung der Politik. Kritisches Denken war in den Bildungs- und Forschungsaktivitäten ebenso am Werk wie im grenzüberschreitenden aktivistischen Handeln und schließlich auch in der Gastfreundschaft, welche die Zusammentreffen bestimmte. Es ging darum, dass die notwendige Konfrontation der Differenzen zur Interaktion werden und in eine Vermischung eintreten konnte – jene Vermischung, mit deren Lob Jean-Luc Nancy, eine Hommage an das damals belagerte Sarajevo formulierend, die erste Ausgabe von Transeuropéennes im Herbst 1993 eröffnete („Lob der Vermischung“[2]). Dies ist also eine der Fährten, die zur Entwicklung des Konzepts „Übersetzen, zwischen den Kulturen“ führten.

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Boris Buden: Vous êtes très claire lorsqu’il s’agit de décrire ce qui était en jeu dans les Transeuropéennes dès les débuts, en 1993 : la quête d’un retour possible au politique et une critique non voilée de l’essentialisation des cultures de même que de l’ethnicisation et de la communautarisation de la politique. C’est là le cadre conceptuel dans lequel vous avez introduit la notion de traduction. La 22e édition de Transeuropéennes, parue au printemps/été 2002, porte le titre « Traduire, entre les cultures ». Pourquoi la traduction, et pourquoi à ce moment ? Comment avez-vous découvert la signification politique et le potentiel critique du concept ?Ghislaine Glasson Deschaumes: Transeuropéennes est un processus agissant, c’est un mouvement de pensée critique. La raison qui la fonde articule intimement la théorie et l’action. Action-réflexion. L’action provoque la réflexion. La réflexion lance l’action.  Elle est sa « trajectoire de chute », comme pour reprendre une expression du compositeur Ahmed Essyad évoquant ce vers quoi la phrase musicale doit tendre. Ainsi en est-il allé de Transeuropéennes , depuis 1993, actions et réflexion intimement liées dans la provocation du politique. Une pensée critique a été au travail dans les activités de formation et de recherche, dans l’action militante à travers les frontières, enfin dans l’hospitalité de la rencontre. Il s’agissait que la nécessaire confrontation des différences puisse devenir interaction, devenir mêlée – cette mêlée sur l’éloge de quoi, en hommage à Sarajevo alors assiégée, Jean-Luc Nancy ouvrait le premier numéro de Transeuropéennes à l’automne 1993 (‘Eloge de la mêlée’). Telle est l’une des pistes à partir desquelles nous avons élaboré ce concept de « traduire, entre les cultures ». Il importe de  rappeler que Transeuropéennes a été créée dans le mouvement d’un tournant fondateur. En trois ans à peine (1989-1992), la chute du mur de Berlin, la première guerre du Golfe, les guerres en ex-Yougoslavie et la partition du pays, la guerre civile en Algérie, la montée en puissance des fondamentalismes et des ethnonationalismes[1] ont bouleversé l’Europe et le monde. La revue est née dans le sentiment d’une extrême urgence. En se fondant sur la nécessaire articulation entre « culture et politique », affirmée dès le premier éditorial, la revue a ouvert un champ de travail sur la critique des discours identitaires et de leurs effets de dislocation humaine, sociale, politique, économique,  tout en s’emparant frontalement de la question de la guerre. Elle remettait alors en cause l’Europe comme horizon, « l’Europe dessaisie »  d’elle-même, dans les guerres en ex-Yougoslavie comme au lendemain de la chute du mur, lorsque l’Union européenne ne sut pas se traduire ni traduire les pays de l’ancienne « Autre Europe »[2] et construisit avec eux la relation sur un mode subalterne.Dans le même mouvement, la revue se fondait comme lieu de travail sur les conditions contemporaines du vivre ensemble, sur la civilité (Balibar) et la pratique du différend. C’est en approfondissant ces travaux théoriques, notamment en vue des premiers Ateliers culturels euro-méditerranéens (formation alternative de jeunes artistes, de jeunes intellectuels, traducteurs, etc.), en 1999, qu’a émergé le concept « traduire, entre les cultures ».Ce concept a émergé à un moment de maturation des travaux de Transeuropéennes, et il en découle. La revue s’est toujours voulue un lieu de traduction, et la grande majorité de ses auteurs étaient des non francophones. En 1999, la revue avait déjà publié deux numéros bilingues français/anglais et elle en préparait un troisième, sur les partitions. Elle tendait déjà vers la transformation en une revue bilingue français/anglais. En tant que revue internationale de pensée critique, elle se révélait être une véritable fabrique de traduction ! Et c’est ainsi qu’elle se définira dans les années qui viennent.Dans les programmes de formation créés en 1994 puis de recherche (à partir de 1996), mais aussi dans les actions militantes menées au cours de ces années, nous nous sommes confrontés au quotidien aux enjeux de traduction, dans toute leur complexité. Le multilinguisme des groupes concernés (étudiants des Balkans, jeunes artistes de la Méditerranée, etc) était en soi un défi posé à chaque participant : un défi permanent de traduction. Mais il est rapidement devenu patent que ce qu’il faut traduire dépasse de loin la langue, que la matière même de la traduction est à la fois plus vaste et plus cruciale. Il s’agit de représentations du monde, des imaginaires, des constructions mémorielles, des modes de relation au corps et à ses signes, au mouvement, au temps, à l’espace, une façon de se relier au genre, etc. Il s’agit aussi d’un affranchissement par rapport à la logique communautaire (parler la langue de la communauté, qui se suffit à elle-même), d’une mise en circulation des savoirs et de leur partage sur une base d’égalité, bref, d’une dynamique motrice pour  la démocratie. Chaque étudiant de nos universités d’été, chaque chercheur ou artiste de nos ateliers, en faisait à un moment l’expérience frontale. Les ateliers devenaient ainsi des espaces-temps fascinants de mise en traduction, qui parfois allaient jusqu’à porter sur les expériences limites : la guerre, le corps, la mémoire refoulée, la langue divisée … Dans cet exercice politique, les limites mêmes de l’échange étaient patentes. Il existe bien un « reste » (Balibar), qui ne peut être traduit, qui ne peut être mis en partage, et cet « os » m’intéresse tout particulièrement. Il ne relève pas nécessairement de l’intraduisible (qui le serait par essence et pour toujours) que du non traduit, qui est contextuel (dans l’espace et le temps). Ce « reste » participe de l’espace vide, l’espace de jeu nécessaire à la traduction, cet « entre » qui appelle l’interaction et qui est central dans « traduire, entre les cultures ».Sur le plan théorique, trois éléments nous ont, dans le même mouvement, conduits à mettre en lumière dès la fin des années 1990 la problématique de la traduction. D’une part, une critique des logiques de domination, sous toutes  leurs formes (y compris d’une communauté sur un individu), a été menée à travers les pensées contemporaines produites dans des horizons géoculturels très divers. D’autre part, l’analyse de la crise du lien social, de l’impensé des sociétés multiculturelles qui ont instauré le droit à la différence en lieu et place du « vivre ensemble », la crise de la démocratie comme crise de la relation d’altérité dans une logique d’égalité, a été centrale pour la revue. Enfin, la production de clôtures identitaires, allant toutes dans le sens d’un refus de l’hybridation, d’un fantasme de la langue propre, de l’identité propre, du corps propre (dans le double sens, en français, de « propre » : ce qui est à soi, ce qui est lavé, sans tache) nous a conduits à éclairer le concept d’identité comme un processus, un mouvement, quelque chose de perméable à la rencontre avec les autres, y compris les autres en soi, et qui se modifie au fil des interactions. On prend alors toute la mesure de la dimension subversive de la traduction, qui reste pour moi fondamentale.C’est donc ainsi que, de fil en aiguille, et dès 1999, Transeuropéennes en est venue à élaborer le concept du « traduire, entre les cultures », formulé notamment dans son vingt-deuxième numéro (2002). Ce concept, depuis, circule et vit,  nourrissant un peu partout des travaux théoriques. Il nourrit désormais la nouvelle phase de la revue Transeuropéennes, à travers ses travaux de recherche, notamment au Collège international de philosophie, et dans son nouveau projet de publication, et il structure ses futures actions, sous l’angle plus précis des politiques de traduction et de leur lien aux enjeux de démocratisation.Il va sans dire que, dès le premier numéro de la revue, nous nous sommes délibérément inscrits en faux contre la logique de « guerre des civilisations » puis de « dialogue des cultures » (surgie, notamment en contrepoint de la lutte contre le terrorisme, après le 11 septembre 2001) qui n’en est que le revers. Transeuropéennes n’a cessé de mettre en lumière l’hétérogénéité de toute culture, le fait que chaque culture, chaque langue participe d’un double processus de traduction et d’hybridation. « Entre les cultures » fait ainsi référence au « jeu » qui travaille toute culture, la maintenant dans l’ouverture, et qui est à son tour traduction. Traduire est une proposition qui engage ce jeu.En tant que lieu d’hospitalité et revue nomade, Transeuropéennes est au cœur du traduire, dans les intervalles, les interstices, les écarts, les différends qui intéressent tant notre collectif. Ce collectif interdisciplinaire  Transeuropéennes est un seuil, car il est un passage entre les langues, entre les modes de pensée, entre les imaginaires lointains ou proches, entre les systèmes critiques. Ceux-ci sont mouvants. Comme Mustapha Laarissa, membre du comité de rédaction de la revue, l’a dit dans un atelier de travail sur les « Politiques de traduction en Méditerranée » (Paris, décembre 2005), le choc est en chaque culture, toujours traversée, et il est en chacun de nous en tant que sujets. Nous ne pouvons faire l’impasse de ces passages, de ces traductions. Ils participent, me semble-t-il, d’un horizon mondial qui devra un jour s’appuyer sur un droit mondial et des modes d’organisation démocratique mondiaux.Boris Buden: Il existe encore un autre état de faits, qui fut déterminant pour l’introduction du concept de la traduction – c’est le contexte historique et politique de la France et de l’Europe aujourd’hui, qui traversent toutes deux une lourde crise : un vieil Etat nation, qui perd sa signification et son importance sous la pression de la globalisation, de même que le projet paralysé d’une communauté politique transnationale, qui n’a toujours pas de constitution démocratique. Qu’est-ce que la traduction peut apporter à cette crise, une sorte de solution ou plutôt son approfondissement continué ? Quelle serait votre préférence ?Ghislaine Glasson Deschaumes: Dans le contexte de la mondialisation des échanges, de standardisation des esthétiques et de dépolitisation de la pensée, d’uniformisation apparente des concepts et des systèmes de pensée, l’Europe est un système régional fragile, aléatoire, mais dont nous ne devons à aucun prix nous dessaisir depuis la position critique qui est la nôtre (nous, revues, nous collectifs de revues), mais qu’il nous faudra toujours à nouveau décentrer et franchir.Le titre « Transeuropéennes » indique la double volonté de dégagement et d’implication : l’Europe comme point de départ ou de passage qu’il convient toujours de réinterroger depuis « ailleurs », le point par rapport auquel il faut toujours se décentrer pour pouvoir l’investir. En 1993, il s’agissait de penser l’Europe et « ses autres », les autres de l’Europe, voire ses laissés-pour-compte, ses sans droits, de penser l’Europe à ses frontières, à un moment aussi, et cette coïncidence est significative,  où un groupe de philosophes s’interrogeait depuis Strasbourg sur l’Europe en devenir sous le magnifique titre de Géophilosophies de l’Europe[3].De prime abord, il s’agissait bien pour moi de mettre en mouvement les lignes de division, de jeter des ponts, de transgresser les frontières imposées, de les interroger, de s’y tenir même, jusque dans le défi physique, un jour de mai 2002 où une cinquantaine de femmes de tous les pays issus de l’ex-Yougoslavie et de France franchirent ensemble le pont de Mitrovica, Kosovo[4].Mes expériences antérieures, avant de fonder Transeuropéennes, m’avaient conduite à travailler inlassablement à relier l’ « Autre Europe », et notamment ses penseurs et artistes dissidents, avec l’Europe de l’Ouest. C’était aussi un franchissement, celui d’un interdit culturel (et politique) imposé par la logique de division et la réalité du mur. La France m’était apparue, dès le moment de mes études, comme fondamentalement ethnocentrée. Depuis lors, rien n’est malheureusement venu contredire cette tendance lourde. Cependant nous savons bien que le niveau national n’est plus aujourd’hui  pertinent en soi. Interroger et comprendre une société, un droit national, une économie nationale sans la mettre en perspective en Europe et dans le monde est irresponsable et dangereux.  Mépriser l’articulation de ces perspectives avec l’échelon local l’est tout autant. Transeuropéennes est adossée à la langue française, elle y prend appui. C’est une langue que j’aime, dans laquelle j’aime écrire et vers laquelle j’aime traduire, même si traduire n’est pas mon métier. Mais le projet de Transeuropéennes est européen et mondial.Aujourd’hui, l’Europe se projette dans le monde à partir d’un discours de centralité, elle tisse des rapports avec ses voisins qui s’inscrivent dans une logique centre-périphérie. En 1993, l’Europe était une question, elle était un cap invitant vers « un autre cap » (Derrida). Cet espace de réflexion ouvert avec la chute du Mur a été refermé par les institutions européennes et les gouvernements des anciens Etats membres. A nul moment, la chance n’a été offerte aux pays issus de l’ancien bloc de l’est de se mettre en traduction, de relier leur passé au présent européen. La tabula rasa auxquels ils ont été invités au nom de la transition démocratique « vers l’Europe » a laissé des sociétés amnésiques, qui refoulent une part de leur vécu et de leur histoire. L’horizon de l’Europe comme projet s’est défait à Sarajevo et dans les guerres d’ex-Yougoslavie. Il ne s’est pas redessiné avec l’élargissement.Le choix institutionnel n’était pas tant entre l’approfondissement et l’élargissement, contrairement à ce que l’on a pu dire. C’est la nature même de la démarche conduite envers les pays anciennement reliés au système soviétique qui doit être questionnée. Les institutions européennes se sont concentrées sur les acquis communautaires, et les pays candidats n’ont donc rencontré de l’Europe (leur horizon durant la guerre froide) que l’ensemble normatif qu’elle constitue de facto.  Que ces pays candidats eussent aussi des acquis n’a pas effleuré les esprits à l’Ouest. On peut parler d’une certaine violence symbolique (celle du vainqueur ?) à l’égard des sociétés dites en transition démocratique. La logique du vainqueur n’est pas une logique de traduction. Elle est une logique de déploiement du système vainqueur. Le processus d’adhésion a été marqué par un lourd déficit de traduction, au sens le plus large du terme. Que les fractures aient ensuite surgi, comme par exemple au moment de la guerre en Irak, était dès lors inévitable.A travers ce processus d’adhésion massif, l’Union européenne s’est auto-consolidée dans sa fonction normative, celle-là même qui gouverne la relation qu’elle a proposé à ses voisins (la « Politique européenne de voisinage »). Elle régit aussi la représentation que le discours communautaire donne de l’Europe dans le monde, largement marquée par cette même position de centre rayonnant vers les périphéries. Face à cela, il incombe notamment au collectif Transeuropéennes d’ouvrir en Europe et aux frontières le chantier de la traduction et des chantiers de traduction.
[1] C’est sur cette question que la complicité avec Lignes s’engagea, en 1990, dans un numéro intitulé « nations, nationalités, nationalismes ».[2] Titre aussi d’une remarquable revue publiée à Paris par les frères Berelowitch jusqu’au tournant des années 1990.[3] Jean-Luc Nancy, Philippe Lacoue-Labarthe, Denis Guénoun, Etienne Balibar, Jacques Derrida, pour n’en citer que quelques uns, s’associant dans un mouvement de réflexion particulièrement fructueux, malheureusement abandonné sans doute du fait d’une lassitude face au tour pris alors par l’Europe. [4] « Actions militantes des femmes à travers les frontières », un projet de Transeuropéennes et d’une dizaine d’ONG des Balkans, initié en 1999 et achevé en 2005.

20120201

La nouvelle génération urbaine des gares européennes

Christian Ruby ----------------------------------------------------------------------------------

Heute ist der neue Berliner Hauptbahnhof der modernste und leistungsfähigste Bahnhof Europas. In Wien, der neue Durchgangsbahnhof wird die Stadt zu einem multi-modalen Knotenpunkt des transeuropäischen Schienennetzes machen und für den internationalen und nationalen Bahnverkehr von großer Bedeutung sein. Das ist wichtig für Europa. Alle Hauptbahnhöfe haben das geliche Ziel. Die neuen Bahnhöfe ermöglicht die reibungslose Durchbindung transeuropäischer Eisenbahnlinien der Nord-Süd- und Ost-West-Achse. Dies bedeutet für Reisende schnellere Zugsverbindungen, mehr Reisekomfort durch einfaches Umsteigen und optimale Anbindungen sowie Barrierefreiheit gemäß den neuesten Standards.

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Stoccarda 21, Monaco, Vienna 2013, Milano, Londra, Parigi, Bruxelles-Midi, … chi non è stato colpito da questi avvenimenti che fanno talora la prima pagina dei quotidiani, senza che nessuno si interessi alla coerenza di un insieme di mutamenti delle stazioni europee degli ultimi anni. Si dovrebbe addirittura proiettare questi siti ferroviari su una carta d’Europa, per poter distinguere che essi costituiscono un tipo di anello particolare della circolazione in Europa.

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Stuttgart 21, Munich, Vienna 2013, Milan, London, Paris, Brussels, ... who has not been struck by these facts? Facts that appear sometimes in the headlines of different newspapers that, unfortunately, nobody seems to be interested. They reveal the coherence of an ensemble of mutations of european train stations the last few years. Those railroads should even be projected on a map of Europe so we can notice that they are constituting a particular iron bond  in the circulation flow of Europe. 
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Stuttgart 21, Munich, Viyena 2013, Milan, Londra, Paris, Bruksel gazetelerin mansetlerinde yer alan olaylara maruz kalmadi ancak tren istasyonlarin butunlugune deyinen sehirler arasinda yer almadi. Ozelikle Avrupa'nin tumune bakilarak ele alinmadi. Avrupa'da demiryolu hatti haritasi yapilsa, bu kitanin ne kadar ozel bir alan. 
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Les gares ne se contentent pas de rendre des services aux usagers. Elles constituent de véritables nœuds politico-urbains, livrés le plus souvent à des solutions technocratiques faussement fonctionnelles.
Stuttgart 21, Munich, Vienne 2013, Milan, Londres, Paris, Bruxelles-Midi, ... qui n’a pas été frappé par ces faits qui font parfois les Unes des journaux, sans que personne ne s’intéresse à la cohérence d’un ensemble de mutations des gares européennes ces dernières années. Il faudrait même projeter sur une carte de l’Europe ces lieux ferroviaires pour s’apercevoir qu’ils constituent un type de maillage particulier de la circulation en Europe, même si toutes n’adoptent pas le patronyme européen (Lille-Europe, ...). Un Club Europe des entreprises de mobilité ferroviaire et de transport urbain a même été fondé.
Ce n’est pas seulement une question urbaine locale. Chaque pays et chaque gare peut avoir ses problèmes urbains spécifiques : édification de la gare sur un site précis, position géographique, heures d’attente, changements de moyens de transport, relative tranquillité des gares au regard des transports à effectuer. Après la Seconde Guerre mondiale, l’exode rural, la modernisation des économies qui exigeaient de la main-d’œuvre venue d’ailleurs, ont poussé à donner aux gares un nouveau portrait. Elles se sont amplifiées, se sont prolongées par des réseaux de transport connexes, mais ont conservé leur statut paradoxal au sein des villes : être à la fois en dehors (par leur histoire et leur construction à la périphérie de la ville) et au-dedans (par absorbement progressif par le tissu urbain en extension).
Il s’agit, de nos jours, d’un changement d’échelle et d’une nouvelle mutation des transports (types de train, et articulation des réseaux de différents transports). Les réseaux de transport doivent désormais se mettre à la hauteur des enjeux européens, et les populations devraient avoir leur mot à dire sur ces bouleversements. Ils doivent se connecter aux aéroports, aux transports urbains, et se plier aux impératifs écologiques.
Au cœur de ce changement d’échelle, ce ne sont pas uniquement les définitions fonctionnelles et architecturales des gares qui vont changer. Certes, des équipes pluridisciplinaires de conception vont élaborer de nouvelles spécifications, des chartes et des programmes applicables quasiment à toutes les gares : dimensions des espaces, gestion de la sécurité, organisation des circulations, accessibilité, design, ... Parfois, les études tiennent compte de l’insertion des gares dans leur environnement.
Mais surtout, une nouvelle cartographie des transports urbains ne peut qu’encourager un certain étalement urbain. On sait que les gares voient se déployer autour d’elles des périphéries larges. Le foncier disponible autour des nouvelles gares devrait relancer des projets d’architecture et d’urbanisme. En général, les gouvernements arguent de la manière dont les nouvelles gares vont contribuer à façonner le développement des métropoles, des villes interconnectées, de manière plus intense. Néanmoins, les gares vont imposer aussi de nouvelles centralités qui élargiront nettement les périphéries des villes.
Il est clair que les gares sont des points névralgiques des liaisons locales et internationales. Mais la question est aussi de savoir si cette interaction favorise ou non des lieux de vie et, au minimum, des modes de gouvernance autour des projets. En général, les concepteurs se contentent de proposer des grandes places, offrant des services (restaurants, commerces, divertissements, réseau Wifi), à tous les usagers. Parfois, ils surajoutent, pour calmer les réticences, des étendues destinées à des salles de concert ou des volumes intérieurs disponibles pour des activités. Le concept de gare est étendu bien au-delà du transport. Souvent, désormais, ils inventent des gares bi-faces qui s’adressent aux habitants des quartiers voisins, des bâtis qui instaurent une continuité entre la gare et le centre ville, sans faire toujours « quartier ».
En réalité, outre des inconvénients dont on pourrait reparler, il est clair que ce sont surtout des modèles de gare identiques qui se profilent, après que les aéroports aient aussi subi la mutation des non-lieux aux architectures internationales. Habituellement référé à l’efficacité, au rapide et au systématique, le concept de gare passe désormais pour l’espace d’un croisement, voué à l’attractivité et à des opérations d’aménagement.
Gare aéroporturaire, gare de la grande vitesse, gare de l’interconnexion européenne, gare de triage, ces gares arriveront-elles à leur fin ? Mailler le territoire européen à l’aune de l’irrigation et de l’échange international des consommateurs. Avec potentiel réfléchi de contrôle des déplacements ? Ce ne sont pas les quelques oeuvres d’art déposées ici ou là qui permettront non plus de faire passer ces gares pour des lieux de culture. D’autant que ces oeuvres sont tout simplement placées sur les lieux que pourraient occuper des sans-abris, des errants ou des exilés.