20110102

Deux faces pour une même pièce ? (II)

Cem Uster
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 Dans ce deuxième volet de l'article, l'auteur mais l'accent sur l'importance de la traduction au sein du biculturel. Il s'agit donc, à travers le cosmopolitisme d'aller rechercher non le sens littéral mais culturel d'une action... En effet, chaque groupe de mots fait référence a une chose ou un fait . Mais la notion de traduction nous questionne sur le « comment » qui associe le mot a la culture. « Comment perçoit-on cette chose ou comment ce fait a lieu au sein d'une culture ? » A travers le jonglage de ces cultures, l'auteur pointe la rotation qu'il réalise sur lui-même, pour donner à chaque terme, son équivalent culturel.
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 In this second part of the article, the author puts the emphasis on the importance of translation within the bicultural. So, through the cosmopolitan look, we give to each notion, not a literal sense but a cultural meaning .. Indeed, each term can refer to a thing or a fact, but with the notion of translation we asked about the "how" that associates the word to the culture. "How do we perceive the thing or, how does this fact takes place within a culture?" Through the juggling of these cultures, the author enters into a rotation process from which he is able to give to each term, their cultural equivalent.
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 Yazarın "çiftkültürlülük" hakkında kaleme aldığı bu ikinci yazı, "çeviri" kavramanın öneminden bahsediyor. Zira, yazar "çeviri" sayesinde olayların "betimleyici" boyutunun yanı sıra kültürel değerlerini de daha iyi anlayacağımızı vurguluyor. Yazar, kelimelerin genelikle bir takım "gerçekleri" ifade etmek için kulanılıldığını hatırlatıktan sonra "çeviri " sayesinde bu "geçeklerin" ötesine gitme şansını elde ettiğimizi savunuyor. Öyle ki, "çeviri" sayesinde "nasıl?" sorusunu sorarak kelimenin "kelime" değerinin ötesine kültür ile bağlantısı yapılıyor. "Kozmopolitizm" kavramı  tüm anlamını ise bu şekilde kazanıyor. Yazar, kendi hayat tecrubesini kullanarak, kendisinin bu yöntemleri nasıl uyguladığını açıklıyor.
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            Le biculturel sollicite un questionnement permanent chez moi. Je dois faire face tous les jours à des questions telles que : « Appartiens-tu plus à la France qu’à la Turquie ? Te sens-tu plus français que turc ? ». Mon frère a tendance à répondre par une seule et une même formulation : « certains éléments sont turcs d'autres français ». Or sa réponse ne s'accorde pas avec l'idée que j'ai du biculturel, d'où mon désaccord avec sa formulation mécanique. Ce qui me frappe dans la formulation de ces questions, c'est notamment la notion « d'appartenance » qui réduit considérablement le biculturel. Admettre « l'appartenance », c'est aussi accepter l'éventuelle frontière qui supposerait un constant changement d'identité opposant les « moi » turc et français. Or, le biculturel évacue l’idée d'entités différentes, de deux identités distinctes...
            La dualité issue du biculturel ne se traduit pas par une rigidité. Plus concrètement, lors d'une conversation avec un français, j'assimile ce que l'on me dit sous la contrainte de la culture française, tout en étant capable aussi de juger sous l'effet de ma seconde culture. Ainsi je ne change pas d'identité, mais je m'adapte. Mon rapport à l'autre s'exprime sous l'effet d'une traduction constante qui me permet de former ce pont entre ces deux cultures, d'adhérer avec plus de précision à la culture et au langage de ce dernier.
            En d'autres termes, il ne s'agit point d'équivalent mais d'une équivalence. On ne traduit pas mot à mot mais selon le sens, et en fonction de ce que signifie ce dernier au sein de sa culture. Effectivement, c'est un travail sur soi qui me permet, selon la personne considérée, de me positionner et de me fondre en lui, et en ce qu'il dit (ce n'est donc pas par l'idée mais par la fréquence que je m'introduis).
            Par exemple, lorsque mes amis me proposent d'aller aux stade pour assister à un match de foot, ils posent leur question de la manière suivante « on va au stade ce soir ? », toutefois en Turquie on me dit « maca gidelim mi bu aksam? » (va-t-on au match ce soir ?). Les questions se ressemblent, cependant, la conception ainsi que les actions qui s'en suivent ne sont pas les mêmes. En France, je sais que l'action correspond à « regarder le match », le visualiser, et à un plaisir propre qui domine sur le commun. En Turquie, pour les jeunes de ma génération, je sais qu'il s'agit d'aller supporter une équipe, prendre le risque de perdre sa voix, au profit de la performance. Pour deux questions identiques, j'ai deux actions différentes que seul mon biculturalisme permet de distinguer, d'où l'importance du concept. Ce terme me permet dans le cas du match de percevoir au delà des expressions, plus concrètement, il me place directement dans l'optique de l'action qui suit la proposition.
            Prenons le problème dans l'autre sens. Il y a peu de temps encore, lors d'une discussion avec un camarade de la faculté, j'ai prononcé la phrase : « En effet, j'ai donné 2 kilos ». Il me fixa curieusement, puis surpris, il me répondit « donné ? » et lorsqu'il comprit que c'était une erreur, il retourna cela en humour et rajouta  « A qui ? à ton voisin ? », ce qui me fit comprendre toute la subtilité résidant dans le biculturel. Le verbe « donner » était la preuve que j'avais réfléchi en turc où le « perdre » se traduit par « donner ». L'erreur, en soi, est simple et sans grande importance, cependant au niveau du biculturalisme, elle prend une toute autre dimension.
La faute suppose qu'il y a deux individus, en l'occurrence deux manières distinctes de penser dont l'une serait turque et l'autre française. Il s'agirait de dire que c'était le « Cem turc » qui a primé pour un petit instant sur le « Cem français ». D'où la clarté de l'aberration. Justement, le biculturel, constitue un travail sur soi et non un changement de facette. Dans ces circonstances, l'erreur change de nature. Le biculturel est représentatif de la continuité et non de la permanence. On s'inscrit dans une dynamique permanente qui évacue la notion de « je suis turc et français ». Le biculturel n'est pas une valise que nous devons chercher a remplir car cela conduit à un non sens. Donc ici, l'erreur n'est pas une erreur mais le fruit d'un mauvais travail de l'homme sur l'homme. La conversion du français au turc ou l'inverse, se doit de représenter  comme une rotation, un mouvement et non un changement d'identité, d'où l'importance d'inscrire la traduction dans le biculturel et le tout dans l'esprit cosmopolite.
            S'oppose au biculturel, le compromis culturel dont le caractère n'est que réducteur s'agissant de la recherche de la pluralité culturelle. Il est nécessaire de se positionner au niveau de la mentalité de l'autre pour aller au delà même de la compréhension. En l'occurrence l'exemple prédominant illustrant ce propos est l'anglais "de l'efficience" qui a pour but, le simple fait de s'entendre. Deux individus de nationalités et cultures différentes peuvent grâce à cet anglais, communiquer, établir une connexion, mais qui se livrerait dans un cadre simpliste. La raison se trouve dans le caractère réducteur du compromis.
Présentons schématiquement : Ces deux individus vont, hormis leurs terrains (A et B) qui représentent leurs cultures bien distinctes, trouver une entente sur un nouveau terrain. Ainsi, peut-être sans le vouloir, ces deux individus vont passer à côté d'une émancipation culturelle. C'est-à-dire, se priver de nouveaux concepts, richesses que représentent les deux cercle A et B.
Certes, l'anglais permet de s'unifier en termes d'« idée », cependant la traduction peut s'avérer différente et peut faire émerger un non sens. Afin d'expliciter mon propos, il me semble nécessaire de redéfinir idée et concept. Le terme de concept  puise étymologiquement ses sources du côté du contenu contrairement à l'idée qui se réduit a l'image. Il s'agit pour le premier terme de décrire, et pour le second de traduire.
D'où l'aspect réducteur du compromis. Car, lorsque nous transposons ce qui est dit en anglais vers la langue d'origine nous établissons des images. Ceci ressemblerait à un programme informatique de traduction aussi élémentaire que : français: Je suis Cem ; anglais : I am Cem.
Or, je conçois le biculturel comme une traduction, amplification de concept. Admettons, que l'individu avec qui je parle n'ait pas de seconde culture, alors, par le simple fait de lui traduire ce que représente le match en Turquie, la personne en question aura réussie à se faire l'idée d'une nouvelle conception du match.
D'où l'importance de la traduction au sein du biculturel.